Descartes et les Mathématiques La Géométrie de DescartesTextes et commentaires de « La Géométrie » de René Descartes sur le théorème de Thalès, les problèmes du second ou du troisième degré. | |||
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Livre premier | Le problème de Pappus | |
SommaireI. La Géométrie - Introduction |
Fac-similé : page 318 et page 370 | ||
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La Géométrie de Descartes demeure aujourd'hui, comme au moment de sa parution, un livre de lecture difficile. Malgré tout, des extraits du début du chapitre 3 peuvent être étudiés à partir de la classe de seconde, voire en troisième. En La Géométrie dit-il, « je tâche à donner une façon générale pour résoudre tous les problèmes qui ne l'on encore jamais été. » Descartes impatient expose l'essentiel d'une solution neuve dans l'ordre de l'invention et il répugne à passer du temps pour la démontrer. | |||||||
Advertissement (page 296)Jusqu'ici (dans le Discours de la méthode) j'ai taché de me rendre intelligible é tout le monde, mais pour ce traité je crains, qu'il ne pourra être lu que par ceux, qui savent déjà ce qui est dans les livres de Géométrie. Car d'autant qu'ils contiennent plusieurs vérités fort bien démontrées, j'ai cru qu'il serait superflu de les répéter, et n'ai pas laissé pour cela de m'en servir. Dés cette introduction Descartes paraît ainsi se faire l'adepte des méthodes actives. Tout au long de son traité, il ne cessera de réaffirmer cette position.
Ce parti pris de l'auteur rend l'ouvrage toutefois exploitable au lycée, avec ces exemples du Livre Premier où sont exposées des méthodes analytiques. LA GéOMETRIE. LIVRE PREMIERDes problèmes qu'on peut construire sans y employer que des cercles et des lignes droites.Tous les Problèmes de Géométrie se peuvent facilement réduire à tels termes, qu'il n'est besoin par après que de connaître la longueur de quelques lignes droites, pour les construire. Comment le calcul d'Arithmétique se rapporte aux opérations de Géométrie.Et comme toute l'Arithmétique n'est composée, que de quatre ou cinq opérations, qui sont l'Addition, la Soustraction, la Multiplication, la Division, et l'Extraction des racines, qu'on peut prendre pour une espéce de Division : Ainsi n'a-t-on autre chose à faire en Géométrie touchant les lignes qu'on cherche, pour les préparer à être connues, que leur en ajouter d'autres, ou en éter, ou bien en ayant une, que je nommerai l'unité pour la rapporter d'autant mieux aux nombres, et qui peut ordinairement être prise à discrétion, puis en ayant encore deux autres, en trouver une quatrième, qui soit à l'une de ces deux, comme l'autre est à l'unité, ce qui est le même que la Multiplication ; ou bien en trouver une quatrième qui soit à l'une de ces deux, comme l'unité est à l'autre, ce qui est le même que la Division ; ou enfin trouver une, ou deux, ou plusieurs moyennes proportionnelles entre l'unité, et quelque autre ligne ; ce qui est le même que tirer la racine carrée, ou cubique, etc. Et je ne craindrai pas d'introduire ces termes d'Arithmétique en la Géométrie, afin de me rendre plus intelligible.
Descartes traduit les opérations par une figure géométrique (triangles de Thalès) mettant en valeur les proportions. | |||||||
II. Le théorème de ThalèsDescartes commence sa Géométrie en introduisant l'unité dans une configuration du théorème de Thalès. La MultiplicationSoit par exemple AB l'unité, et qu'il faille multiplier BD par BC, je n'ai qu'a joindre les points A et C, puis tirer DE parallèle à CA, et BE est le produit de cette Multiplication. La DivisionOu bien s'il faut diviser BE par BD, ayant joint les points E et D, je tire AC parallèle à DE, et BC est le produit de cette division. Figures ci-dessousAvec les fléches de direction modifier les valeurs des paramètres : taper sur la touche <B> pour modifier b ; taper sur <A> pour revenir modifier a. | |||||||
La multiplicationa = BD ; b = BC ; z = ab = BC Télécharger la figure GéoPlan thales_m.g2w |
La divisiona = BE ; b = BD ; z = = BC Télécharger la figure GéoPlan thales_d.g2w | ||||||
III. L'extraction de la racine carréOu s'il faut tirer la racine carrée de GH, je lui ajoute en ligne droite FG, qui est l'unité, et divisant FH en deux parties égales au point K, du centre K je tire le cercle FIH, puis élevant du point G une ligne droite jusqu'à I, à angles droits sur FH, c'est GI la racine cherchée… | |||||||
a = GH ; FG = 1 ; z = GI = . |
Le carré de la hauteur issue de l'angle droit d'un triangle rectangle est égal au produit des longueurs des segments découpés sur l'hypoténuse. La démonstration de cette propriété se fait dés la classe de troisième en remarquant que le triangle FIH, inscrit dans un demi-cercle, est rectangle en I et en calculant les tangentes des angles H et Î des triangles rectangles semblables IHG et FIG sont égales. tan H = , tan Î = ; d'où l'égalité des rapports = . Le produit des « extrêmes » est égal au produit des « moyens » : Cette construction, due à Euclide, était connue, avant Descartes, par exemple de Bombelli (1526-1572) qui la cite dans son algebra publiée en 1572. Télécharger la figure GéoPlan cerc_rac.g2w | ||||||
IV. L'équation du second degréLes Babyloniens, au deuxième millénaire avant J.-C., savait trouver les solutions positives des équations du second degré avec la formule algébrique. Ces formules ont été ignorées par les Grecs et réintroduites par Diophante au IVe siécle et transmises à l'Occident par le mathématicien Al-Harizmi au IXe siécle. Équations ayant une seule racine positiveDescartes fait une seule figure pour résoudre les deux types d'équations z2 = é a z + b2. Le coefficient constant b2 est élevé au carré pour rendre l'équation homogène. Les calculs utilisent la puissance d'un point par rapport à un cercle, notion disparue de l'enseignement franéais au lycée. La puissance d'un point M par rapport au cercle est le produit MO × MP, où une sécante issue de M coupe le cercle en O et P. Cette puissance est constante lorsque la droite varie. Elle est égale au carré de la longueur d'une tangente au cercle issue de M. Elle est aussi égale à la différence du carré de la distance du point au centre du cercle moins le carré du rayon. On montre facilement que : MO × MP = (MN + NO) × (MN - NO) = MN2 - NO2 = LM2, On a bien : z (z à a) = b2. La méthode de Descartes ne lui fait chercher que la « vraye » racine positive de ces équations : MO pour z2 = a z + b2 et MP pour z2 = – a z + b2. Pour MO on a MO = MN + ON, donc MN = z - et le théorème de Pythagore dans le triangle rectangle LMN permet d'écrire : Pour MP on a MO= MN - NP, donc MN = z + , soit MN = z + = . | |||||||
Avec les fléches de direction modifier les paramètres : |
Équation z2 = a z + b2« Et lors cette racine, ou ligne inconnue se trouve aisément. Car si j'ai par exemple . »
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Équation y2 = – ay + b2Que si j'ai yy = – ay + bb, et qu'y soit la quantité qu'il faut trouver, je fais le même triangle rectangle NLM, et de sa baze MN j'éte NP égale à NL, et le reste PM est y la racine cherchée. De façon que j'ai . Et tout de même si j'avais x4 = – ax2 + b2. PM serait x2 et j'aurais ; et ainsi des autres. | |||||||
Équation z2 = a z - b2 |
Équation ayant deux racines positives : z2 = az – b2Descartes utilise la puissance du point M par rapport au
cercle qui est : ML2 = MQ × MR. MQ . MR = (MI - IR) . (MI + IR) or MQ + MR = a, donc si z est une des longueurs, l'autre est a-z, on a bien z(a-z) = b2. Dans le triangle rectangle NIR on a IR2 = NR2 - NI2 = - b2 Si z = MR on a IR = MR - IM = z - donc IR2 = (z - )2 = finalement z - = soit De même , si z = MQ on a IQ = IM - MQ = - z ; donc IQ2 = ( - z)2 = IR2 = . Finalement - z = soit . Télécharger la figure GéoPlan eq_2de_2.g2w
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Voici le texte de Descartes« Enfin si j'ai z2 = az - bb : je fais NL égale à a, et LM égale à b comme devant, puis, au lieu de joindre les points M N je tire MQR parallèle à LN. et du centre N par L ayant décrit un cercle qui la coupe aux points Q et R, la ligne cherchée z est MQ, ou bien MR, car en ce cas elle s'exprime en deux façons, à savoir et . Et si le cercle, qui ayant son centre au point N, passe par le point L, ne coupe ny ne touche la ligne droite MQR, il n'y a aucune racine en l'Équation, de façon qu'on peut assurer que la construction du Problesme proposé est impossible. » « Au reste ces même s racines se peuvent trouver par une infinité d'autres moyens, et j'ai seulement voulu mettre ceux-ci, comme fort simples, afin de faire voir qu'on peut construire tous les Problesmes de la Géométrie ordinaire, sans faire autre chose que le peu qui est compris dans les quatre figures que j'ai expliquées. Ce que je ne crois pas que les Anciens aient remarqué. Car autrement ils n'eussent pas pris la peine d'en écrire tant de gros livres, où le seul ordre de leurs propositions nous fait connaître qu'ils n'ont point eu la vraye méthode pour les trouver toutes, mais qu'ils ont seulement ramassé celles qu'ils ont rencontrées. »
Fac-similé : page 303 | |||||||
V. Les équationsDescartes énonce le théorème fondamental de l'algébre inventé par Albert de Girard en 1629 : « Sachés donc qu'en chaque Équation autant que la quantité inconnué a de dimensions, autant peut-il y avoir de diverses racines, c'est-à-dire de valeurs de cette quantité ». D'Alembert lui donnera son nom et Gauss le démontra en 1799. Les racines positives sont dites « vrayes », les négatives « fausses » ou « moindres que rien », mais « quelque fois seulement imaginaires c'est-à-dire que l'on peut toujours en imaginer autant que j'ai dit en chaque équation, mais qu'il n'y a quelquefois aucune quantité qui corresponde à celle qu'on imagine ». Le mot de Descartes sera utilisé par la suite pour désigner les nombres complexes qu'il ne savait pas calculer. Il formule le théorème sur la factorisation d'un polynéme qui « peut toujours être divisé par un binéme composé de la quantité inconnue moins la valeur d'une des vraies racines ou plus la valeur de l'une des fausses […] et réciproquement… » | |||||||
Avec les fléches de direction modifier les valeurs des paramètres ; Télécharger la figure GéoPlan eq_4de_1.g2w |
Exemple de l'usage de ces réductions« Mais affin qu'on puisse mieux connoïtre l'utilité de cette reigle il faut que je l'applique à quelque problesme. Si le carré AD, et la ligne BN étant donnés, il faut prolonger le côté AC jusques à E, en sorte que EF, tirée de E vers B, soit égale à NB : on apprend de Pappus, qu'ayant premièrement prolongé BD jusques à G, en sorte que DG soit égale à DN, et ayant décrit un cercle dont le diamètre soit BG, si on prolonge la ligne droite AC, elle rencontrera la circonférence de ce cercle au point E qu'on demandoit. Mais pour ceux qui ne sauroient point cette construction, elle seroit assez difficile à rencontrer ; et, en la cherchant par la méthode ici proposée, ils ne s'aviseroient jamais de prendre DG pour la quantité inconnue, mais plutôt CF ou FD, à cause que ce sont elles qui conduisent le plus aisément à l'Équation ; et lors ils en trouveroient une qui ne seroit pas facile à déméler sans la reigle que je viens d'expliquer. Car posant a pour BD ou CD, et c pour EF, et x pour DF, on a CF = a - x, et comme CF ou a - x est à FE ou c, ainsi FD ou x est à BF, qui par conséquent est . Puis à cause du triangle rectangle BDF dont les côtés sont l'un x et l'antre a, leurs carrés, qui sont x2 + a2, sont égaux à celui de la baze, qui est ; de façon que, multipliant le tout par x2 - 2ax + a2, on trouve que l'équation est x4 - 2ax3 + 2a2x2 - 2a3x + a4 = c2x2, ou bien x4 - 2ax3 + (2a2 - c2) x2 - 2a3x + a4 = 0 ; et on connoït par les règles précédentes que sa racine, qui est la longueur de la ligne DF, est Que si on posoit BF, ou CE, ou BE, pour la quantité inconnue, on viendroit derechef à une Équation en laquelle il y auroit quatre dimensions, mais qui seroit plus aisée à déméler, et on y viendroit assez aisément; au lieu que si c'étoit DG qu'on supposét, on viendroit beaucoup plus difficilement à l'Équation, mais aussi elle seroit très simple. Ce que je mets ici pour vous avertir que, lorsque le Problesme proposé n'est point solide, si en le cherchant par un chemin on vient à une Équation fort composée, on peut ordinairement venir à une plus simple en le cherchant par un autre. Je pourrois encore ajouter diverses reigles pour déméler les Équations qui vont au cube ou au carré de carré, mais elles seroient superflues; car lorsque les Problesmes sont plans on en peut toujours trouver la construction par celles-ci. » | ||||||
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RemarquesL'équation du quatrième degré a une autre solution réelle qui correspond au point F’ aligné avec le point E’ d'intersection du cercle et du segment [AC] et le point B. Les deux autres solutions sont imaginaires : Lorsque selon le conseil de Descartes on choisit BF comme inconnue x, on sait que DG = ND et que dans le triangle rectangle DBN on a : DN2 = a2 + c2. | ||||||
Les triangles rectangles BDF et BEG sont semblables, d'où , soit . L'équation du second degré admet bien la solution positive .
Par ailleurs, si effectivement on choisit b = DG comme paramètre on a : La proportion précédente devient qui conduit à l'équation du second degré x(x + c) = a(a + b). Cette équation admet comme solution positive . l'expression de DF devient DF = Télécharger la figure GéoPlan eq_4de_2.g2w Citons les conclusions de Descartes qui suivent ce paragraphe :« Et on peut aussi, en suite de ceci, exprimer les racines de toutes les Équations qui montent jusques au carré de carré, par les reigles ci-dessus expliquées. En sorte que je ne sache rien de plus à désirer en cette matière. Car enfin la nature de ces racines ne permet pas qu'on les exprime en termes plus simples, ny qu'on les détermine par aucune construction qui soit ensemble plus générale et plus facile. Il est vray que je n'ai pas encore dit sur quelles raisons je me fonde, pour oser ainsi assurer si une chose est possible ou ne l'est pas. Mais, si on prend garde comment, par la méthode dont je me sers, tout ce qui tombe sous la considération des Geometres se réduit à un même genre de Problesmes, qui est de chercher la valeur des racines de quelqu'Équation, on jugera bien qu'il n'est pas malaisé de faire un dénombrement de toutes les voies par lesquelles on les peut trouver, qui soit suffisant pour démontrer qu'on a choisi la plus générale et la plus simple. » | |||||||
VI. La racine cubiqueL'invention de deux moyennes proportionnelles. (Livre Troisième)Dans le livre troisième Descartes construit des lignes courbes afin de résoudre des problèmes du troisième degré (« Problesmes solides »). Descartes veut résoudre l'équation z3 = a2 q (il l'écrit sous la forme z3 ** a2q avec un symbole ressemblant à l'infini pour l'égalité et deux étoiles indiquant que l'équation ne comporte pas de monémes en z2, ni en z). Le carré a2 est introduit pour que le terme de droite soit aussi de dimension 3 suivant ainsi la règle des homogènes de Viéte. Mais Descartes s'en affranchit aussitét, faisant a 1 (a = 1) et inventant l'introduction de l'unité. | |||||||
z et z’ sont deux moyennes proportionnelles de a et q si a, z, z, z’ forment une proportion ainsi que z, z’, z’, q. Maintenait on dirait que a, z, z’, q sont en progression géométrique. On a alors z' =
et q = et ces quatre nombres sont égaux à : Avec la méthode des coordonnées dont Descartes a jeté les bases (et en conservant son orientation : l'origine est A, les abscisses z sont dirigées
vers la gauche, les ordonnées y vers le bas) la géométrie analytique permet de trouver l'équation du cercle de centre E(, ) passant par A : La parabole (FAG) d'équation y = admet [AC) comme essieu (axe) et C comme foyer. Le deuxième point d'intersection de la parabole et du cercle est le point F de coordonnées FL et LA. En éliminant y dans ces deux équations, on trouve z = = FL et = LA. Télécharger la figure GéoPlan rac_cubi.g2w
Avec les flèches de direction modifier les valeurs des paramètres : taper sur la touche <A> pour modifier a ; taper sur <Q> pour revenir modifier q. | |||||||
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