René DescartesDescartes et les Mathématiques

Les grands problèmes de la géométrie grecque

Nombres constructibles, quadrature, duplication

Les géomètres grecs n'avaient pas GéoPlan, ni GeoGebra

Sommaire

1. Points et nombres constructible

2. Quadrature du cercle
    Calcul de π dans le papyrus de Rhind
    Lunules d'Hippocrat

3. Duplication du carré et du cube

Le troisième grand problème de la géométrie grecque :

      La trisection de l'angle

La quadrature du rectangle

1. Points et nombres constructibles

Point constructible

Définition : un point est constructible à partir d'un ensemble E si je peux le construire d'une façon précise à partir de E, à la règle non graduée et au compas.
Plus précisément l'ensemble E1 des éléments constructibles, en une étape, à partir d'un ensemble E est formé par :
  • les points de E,
  • les points d'intersection des droites distinctes, passant par deux points distincts de E,
  • les points d'intersection des cercles distincts de centre un point de E, passant par un autre point de E,
  • les points d'intersection des droites et des cercles définis ci-dessus.

De même, E2 est l'ensemble des éléments constructibles en une étape à partir de E1, E3 à partir de E2, et ainsi de suite.

Définition : un point M est constructible à partir de E, s'il existe un i tel que M appartienne à Ei (on peut construire M en i étapes).

Définition : on appelle point constructible du plan (euclidien), tout point constructible à partir de E = {O, I} où OI =1.

repere orthonorme O, I, J constructibles - copyright Patrice Debart 2005

Application : montrons que le point J(0, 1) est constructible avec la construction de la médiatrice d'Œnopide de Chios (Ve siècle avant J.-C.) :

E1 contient le point I’, intersection de la droite (OI) et du cercle de centre O, passant par I.

E2 contient les points A et A’, intersections du cercle de centre I, passant par I’, et du cercle de centre I’, passant par I.

La médiatrice (AA’) de [II’] coupe le cercle de centre O, passant par I en J et J’, points de E3.

(O ; I ; J) est un repère orthonormé constructible du plan euclidien.

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Définition : on appelle nombre constructible la longueur associée à deux points constructibles.

Propriétés : Dans le plan euclidien, muni d'un repère orthonormé (O ; I ; J), toute coordonnée d'un point constructible est un nombre constructible ;
un point M(a, b) est constructible si et seulement si a et b sont des nombres constructibles.

Remarque : on parle aussi de « nombre constructible à la règle et au compas ».

Vérification

les points A et B etant constructibles, la longueur AB est constructible - copyright Patrice Debart 2005

Si A et B sont deux points constructibles, alors la distance AB est un nombre constructible.

Indications :

Le point C, quatrième sommet du parallélogramme OABC, est constructible.

Le point D est constructible avec OD = OC = AB = d.

Le nombre d, abscisse d'un point constructible, est constructible.

La longueur AB est bien un nombre constructible.

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La somme de deux nombres constructibles est constructible

la somme de deux nombres constructibles est constructible - copyright Patrice Debart 2005

Soit a et b deux nombres constructibles ; A et B les points constructibles d'abscisses a et b.

En traçant le cercle centre A et de rayon b le nombre a+b correspond au point constructible S si a est positif ;
au point S’ s'il est négatif. a+b est donc constructible

L'opposé d'un nombre constructible est constructible

l'oppose d'un nombre constructible est constructible - copyright Patrice Debart 2005

Le produit de deux nombres constructibles est constructible

Voir : la démonstration par l'application du théorème de Thalès dans la Géométrie de Descartes

    ou la page construction de réels en seconde.

L'inverse d'un nombre constructible non nul est constructible.

l'inverse d'un nombre constructible non nul est constructible - copyright Patrice Debart 2005

Le point A a pour abscisse a non nulle.

M est un point du cercle non situé sur Ox.

La parallèle à (AM) menée par I coupe (OM) en B.

Le point B est constructible et sur la droite repérée (O, M) a pour abscisse 1/a.

1/a est un nombre constructible.

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Le quotient d'un nombre constructible par un nombre constructible non nul est constructible.

Voir : nombre a/b dans la page construction de réels en seconde.

La racine carrée d'un nombre constructible positif est constructible.

Voir : construction d'Euclide reprise par Descartes dans l'article construction de réels en seconde.

Nombre algébrique

Rappel : un nombre est algébrique sur un corps K s'il existe un polynôme non nul, à coefficient dans K, s'annulant sur ce nombre.

Sur Q un nombre algébrique est solution d'une équation à coefficients entiers.

Pierre-Laurent Wantzel, mathématicien français, a montré en 1837 qu'un nombre constructible est algébrique sur Q et son degré est une puissance de 2.
La réciproque est très utile pour montrer qu'un nombre n'est pas constructible.

Polygones constructibles

Théorème : un polygone régulier de n côtés est constructible si cos 2pi/n est un nombre constructible.

Pour n = 3, 4, 5, 6, 8, 10, 12, 15, 16, 17, 20… les polygones à n côtés sont constructibles. Pour n = 7,   9, 11, 13, 14, 18, 19… ils ne le sont pas.

2. Quadrature du cercle

La quadrature du cercle : tracer, à la « règle et au compas », un carré de même aire qu'un cercle donné.

La quadrature du cercle nécessite la construction à la « règle et au compas » d'un segment de longueur la racine carrée de π.

Ce problème n'est pas résoluble, car en raison de la transcendance, π n'est pas constructible.

WikiPédia : quadratrice de Dinostrate.

Calcul de π dans l'ancienne Égypte

octogone non régulier pour le calcul de pi dans le papyrus Rhind - copyright Patrice Debart 2005Le papyrus mathématique égyptien le mieux conservé est le papyrus Rhind, écrit par le scribe Ahmés vers 1650 avant J.-C. ;
Rhind est le nom du premier propriétaire Écossais qui l'acheta à Louxor en 1857.

Parmi quatre-vingt-sept problèmes, accompagnés de leurs solutions, on trouve la règle suivante pour la quadrature du cercle :
pour « construire un carré équivalant à un cercle… retirer 1/9 au diamètre et construire le carré sur ce qui reste ».

Justifications

calcul de pi dans l'ancienne Égypte - copyright Patrice Debart 2005

L'aire du disque de diamètre 1 est PI/4.

Cette aire du disque est voisine de celle de l'octogone ABCDEFGH (non régulier).
Son aire, composée de cinq carrés et quatre demi-carrés, est égale à 7 carrés soit 7 × 9/81 = 63/81.

Ce nombre 63/81 est voisin du carré 9/81, aire du carré de côté 8/9 : (1 − 1/9)2 = 9/81.

Les « anciens Égyptiens » utilisaient donc pour π la valeur de 4 × (1 − 1/9)2 = 256/81 ≈ 3,16, avec une incertitude relative de 6/1000 pour le calcul de π.

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Calcul de π : ti-92

Lunules d'Hippocrate

grands problèmes de La Géométrie grecque - quadrature des lunules - copyright Patrice Debart 2005

Définition : une lunule est une portion de surface délimitée par deux cercles non concentriques de rayons différents,
formant un croissant de lune en forme de ménisque : convexe d'un côté et concave de l'autre.

Les quatre lunules

Au Ve siècle avant J.-C. Hippocrate de Chios est le premier à s'être intéressé aux quadratures.

Il n'a pas réussi pour le cercle, mais il prouva la « quadrature » des lunules.

Les quatre lunules hachurées en bleu sont les surfaces comprises entre le cercle de rayon r circonscrit au carré ABCD
et les demi-cercles ayant pour diamètre d les côtés du carré :

l'aire du carré ABCD est égale à la somme des quatre aires des lunules.

Léonard de Vinci généralisera cette propriété à d'autres lunules construites sur des figures diverses.

Preuve

Le secteur circulaire OAB a une une égale au quart de l'aire du cercle de rayon r = OA,
soit 1/4πr2 = 1/4π(drac(2)/2)2 = (pi d^2)/8.

Cette surface est faite du triangle OAB et du segment circulaire AB.
Le demi-cercle de diamètre d = AB a une aire égale à 1/2π(d/2)2 = (pi d^2)/8. Cette surface est faite d'une lunule et du segment circulaire.

Ces deux aires sont égales. Quand on leur retranche l'aire du segment circulaire, on trouve bien que l'aire de l'aire de la lunule est égale à celle du triangle OAB, soit le quart de l'aire du carré.

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Quadrature de la parabole par Archimède : analyse en 1L

Théorème de Pythagore

3. Duplication du carré et du cube

Duplication du carré : tracer à la « règle et au compas » un carré d'aire double d'un carré donné.

Construction avec une diagonale

les grands problèmes de la géométrie grecque - duplication du carré - copyright Patrice Debart 2005

Dans Ménon, un dialogue de Platon, Socrate explique la construction ci-dessus à un jeune esclave.

La diagonale du « petit carré » le partage en deux triangles isocèles rectangles.
Le « grand carré » est formé de quatre triangles isocèles rectangles, de même aire.

Le rapport des aires des carrés est 2,
Le rapport des côtés est racine de 2.

Remarque : la similitude directe, de centre A, d'angle 45° et de rapport rac(2), transforme le carré ABCD en le carré ACEF.

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Carrés de Léonard de Vinci

duplication du carré - Leonard de Vinci - copyright Patrice Debart 2005

Le carré circonscrit à un cercle a une aire double de celle du carré inscrit dans ce cercle.

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Solution de Léonard de Vinci

duplication du carré - Leonard de Vinci - copyright Patrice Debart 2005

À partir d'un « petit carré » ABCD, de centre O, on trace les cercles centrés sur les sommets, passant par O.
Ces cercles se coupent en E, F, G, H, symétriques de O par rapport aux côtés du petit carré.
EFGH est un « grand carré » tangent au cercle circonscrit à ABCD.

Les diagonales du « petit carré » le partagent en quatre triangles isocèles rectangles.
On obtient le « grand carré » avec quatre autres triangles isocèles rectangles de même aire, symétriques des quatre premiers.

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Duplication du cercle d'Archimède

les grands problèmes de la géométrie grecque - duplication du cercle d'Achimede - copyright Patrice Debart 2005

Proposition VII du livre des lemmes

Si un cercle est circonscrit à un carré, et si un autre cercle lui est inscrit, le cercle circonscrit sera double du cercle inscrit.

Circonscrivons un cercle AB au carré AB, et inscrivons-lui le cercle CD. Que AB soit la diagonale du carré et le diamètre du cercle circonscrit.
Conduisons dans le cercle inscrit le diamètre CD parallèle au côté AE, qui est égal à CD.

Puisque le carré de AB est double du carré de AE ou de DC, et que les cercles sont entre eux comme les carrés de leurs diamètres, le cercle AB sera double du cercle CD.
Ce qu'il fallait démontrer.

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Retrouver ces paragraphes dans : carré au collège

Voir duplication de figures : triangle, rectangle…

Problème pythagoricien du Ve siècle avant J.-C. : trouver un triangle rectangle isocèle « calculable » avec les quatre opérations des entiers.
Cela revient à trouver deux nombres naturels x et y, non nuls, tels que 2x2 = y2.

Étudier les solutions possibles selon la parité de x et y.
Si x pair et y pair en divisant les deux nombres par 2, éventuellement plusieurs fois, on obtiendrait un nombre impair, si le problème avait une solution (x, y), un des deux nombres serait impair.
Une solution dans laquelle le nombre y est impair est impossible : en effet, si y est impair, alors y2 est impair et ne peut être égal au nombre pair 2x2.

Reste le cas où x est impair et y pair. Dans ce cas, la moitié de 2x2 est impaire, alors que celle de y2 est paire : ces deux nombres ne peuvent pas être égaux.

Il n'existe donc pas de naturels (ni de rationnels) tels que 2x2 = y2. Le rapport entre le côté et la diagonale du carré est irrationnel.
Cette découverte sera alors vécue comme une catastrophe plus qu'une incitation à aller plus loin.
Cela justifiera le passage du calcul au raisonnement qui sera l'acte de naissance des mathématiques au Ve siècle.

On aurait pu penser que les Grecs, mathématiciens et philosophes découvrant la méthode axiomatique, auraient cherché à comprendre comment articuler ces nouvelles mathématiques avec les calculs plus anciens des Mésapotamiens et des Égyptiens. Au contraire, ils ont fait table rase du passé et abandonné le calcul pour le raisonnement.

Le calcul ne fut pas pour autant complément abandonné. Voir par exemple l'algorithme d'Euclide pour le calcul du PGCD ou les mathématiques du moyen-âge.
Mais il faudra attendre le XVIIe siècle, avec Descartes et la notion de coordonnées, pour la synthèse entre l'algèbre et la géométrie.

Publimath D'après Dowek Gilles – Les métamorphoses du calcul - Le pommier 2007

Duplication du cube : problème de Délos (problème déliaque) posé par les sophistes grecs au VIe siècle avant J.-C.
Construire un autel cubique, à la gloire d'Apollon, de volume deux fois plus grand que celui déjà présent dans le temple.

Le polynôme minimal du nombre rac cubique(2) est x3 − 2 = 0 de degré 3. rac cubique(2) est un nombre algébrique de degré 3 sur Q. Ce nombre n'est pas un nombre constructible.
La duplication du cube n'est pas possible.

Table des matières

Dans d'autres pages du site

Index analyse

Les Éléments d'Euclide

La quadrature du rectangle

La Géométrie de Descartes

La parabole chez les Anciens

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Rétroliens (backlinks)

Les trois problèmes de l'antiquité : m@ths et tiques

Les trois grands problèmes de l'antiquité grecque : IREM de Marseille

 

Page no 80, créée le 14/3/2005
modifiée le 2/7/2013